Le couple : mythe, réalité ou utopie utile - mémoire de fin d'études de Patrick FRASELLE - partie 1


Publié le 7 Septembre 2014

Préalable
Ouvrages conseillés sur la psychothérapie de couple
Je vous invite à lire l'ouvrage d'Erich Fromm
« L'art d'aimer », Épi, 1978.
Ouvrages sur le couple de Jean-Georges LEMAIRE
Jean-Georges Lemaire, membre de la Société psychanalytique de Paris, est professeur de psychologie clinique à l'université Descartes-Sorbonne, et directeur du Centre médico-psychopédagogique du Centre hospitalier de Versailles. Ses principaux ouvrages, à propos des thérapies du couple et de la famille, soulignent l'importance des attitudes corporelles, à entendre comme expressions d'un authentique langage du corps, partie intégrante, comme le langage verbal, d'un registre symbolique nécessaire à toute exploitation psychothérapique. Un des grands spécialistes actuels de la psychothérapie de couple.
Les thérapies du couple , Jean-Georges LEMAIRE, Payot, Paris, 1971 ;
Le couple : sa vie, sa mort , Jean-Georges LEMAIRE, Payot, Paris, 1979 ;
Comment faire avec la passion , Jean-Georges LEMAIRE, Payot, Paris, 2000 ;
Les conflits conjugaux , Jean-Georges LEMAIRE, ESF, Paris, 1970 ;
Vous pouvez aussi lire mon ouvrage en ligne.
En cliquant sur le lien plus bas dans l'article, vous aurez accès à un fichier PDF imprimable.
Le couple : mythe, réalité ou utopie utile ?
Patrick FRASELLE
Institut de Sophia-Analyse de Bruxelles
Formation à l’anthropologie existentielle à la psychanalyse et à la psychothérapie 2009
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Remerciements
ma mère, sans laquelle mon terroir ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui… Même si mon parcours personnel est très fou et ma souffrance particulièrement traumatisante, je ne voudrais jamais changer d’histoire. Je ne voudrais pas changer de destinée. Mon enfance brisée et meurtrie a fait de moi ce que je suis devenu aujourd’hui : intellectualité, résilience, réflexion, profondeur, spiritualité, poésie, richesse, dons artistiques, créativité, écriture, sublimation. En fait, que des cadeaux ! Sans ces blessures originelles, je n’aurais pas fait cette route, je n’aurais pas fait 25 années de psychothérapie, je n’aurais pas rencontré la psychanalyse. Je n’aurais pas rencontré la sophia-analyse. Je ne serais pas moi mais… un autre.
Mes  remerciements tout particulièrement ainsi que profondément affectueux à Luis Alberto Aquino Benitez, Directeur Scientifique de l’Institut. Mon promoteur de mémoire, mon père de groupe, mon psychothérapeute-formateur, mon superviseur. Luis m’a porté avec une bienveillance ainsi qu’une infinie patience tout le long de cette formation, ainsi qu’avec de l’amour vrai. Pour son aide précieuse quant  à voir clair dans le rapport aux patients en souffrance ainsi que dans la psychothérapie de couple.
Mes très chaleureux remerciements à Dominique Lippens de Aquino, ma mère de groupe. Pour son cours sur l’envie, pour son travail de fin de formation sur l’envie qui nous bouleverse jusqu’à la trame émotionnelle. Pour son avis scientifique pertinent. Pour son généreux soutien pendant l’élaboration de mon travail sur François Pirette.
Mes très affectueux remerciements  à Benoît de Coster, Directeur de l’Institut pour son humour ainsi que la qualité scientifique de ses différents cours. Pour sa présence touchante.
Mes très affectueux remerciements à Pascale Lapiere pour son beau (dis)cours sur Winnicott.
Mes très affectueux remerciements à Pascale Lapiere et à Benoît de Coster, mère et père de groupe de formation, pour leur soutien émotionnel lors du travail dans les groupes ainsi que pour la richesse des supervisions de mes groupes didactiques.
Merci à chaque membre de ma génération 9, pour leur présence dynamique, qui me laisse en lien permanent avec la réflexion ainsi qu’avec la transformation ainsi que l’évolution humaine, émotionnelle et spirituelle quotidienne.
Merci à Michel Daco qui m’a littéralement poussé vers l’Institut de Sophia-Analyse de Bruxelles lorsque j’ai décidé de faire une formation en psychothérapie psychanalytique. Il m’avait dit : « C’est la meilleure formation que tu puisses trouver en Belgique. » Je suis effectivement fier ainsi que trans-(au-delà)formé  par la richesse d’ensemble de l’Institut, des cours, du suivi, de la pertinence scientifique, de la profondeur ainsi que de l’humanité de chacun de nos formateurs.
Un merci tout spécial ainsi que bien vif à Anita Wangen,  sœur de génération, qui m’a donné une impulsion très positive par ses encouragements sincères ainsi que la force persuasive ainsi que déterminée de sa parole : en effet, j’allais « pseudo »-abandonner ce mémoire ou bien encore prendre une année de plus… Ce qui en rapport à mon histoire personnelle  aurait concrétisé une autocastration supplémentaire sans objet possible de suite. Ainsi, la spirale  négative se répétant sans cesse… Bref, une ineptie contre la vie ! La force de sa parole m’a percuté. Sa parole, a représenté, pour moi, la belle ainsi que réelle incarnation du soutien, allant d’un être humain à un autre.
Mes remerciements s’adressent également à Jeannine Leprince, à André Leprince, à Cathy Wagneur  qui  se sont penchés sur les corrections ainsi que sur le formatage de mon mémoire tout le long de mon travail. Aides précieuses et concrètes, au demeurant de la réalité physico-matérielle, objectivité tridimensionnelle. La quatrième dimension humaine ontologique, étant, dès lors sous-jacente, comme excroissance possible. Merci pour leur engagement jusqu’au bout et cette infinie patience qui caractérise la beauté humaine du lien.
Avec mon humble gratitude.
Patrick FRASELLE

« Pour séduire, il faut s’être senti précieux… »
Gisèle Harrus-Révidi, psychanalyste

« L’homme moderne a perdu contact avec lui-même, avec autrui et avec la nature. Transformé en marchandise, il éprouve ses forces vitales comme un investissement dont il doit tirer le maximum du profit possible en rapport avec les conditions du marché. Les rapports humains sont essentiellement des rapports entre automates aliénés, chacun assurant sa sécurité en s’efforçant de rester proche de la foule et de ne pas s’en distinguer en pensée, sentiment ou action. Dès lors, chacun reste absolument seul, en proie à l’insécurité, l’angoisse et la culpabilité, tous sentiments inéluctables lorsque l’on ne parvient pas à surmonter la solitude humaine. »
Erich Fromm, L’art d’aimer

« L’amour est suicide mais l’amour est la seule réponse. »
Vérité populaire recueillie par le biais d’un graffiti dans les toilettes d’un bar à Liège.

Le rôle de ma mère, dans ma petite enfance, a inféodé toutes mes relations bipolaires…
P.F.


Avant-propos
Naissance intuitive de la psychanalyse
On appelle « sens commun » toutes les réflexions populaires qui permettent de changer, d’éviter ou bien de critiquer un comportement humain. Ce sens commun intuitif largement puisé dans l’inconscient plus loin dans l’inconscient collectif pourrait être cette espèce de fécondation mentale « analytique sans le savoir » qui donne, plus tard, naissance au concept de psychanalyse. La psychanalyse était donc née avant la lettre. Pour illustrer ce sens commun ainsi que la notion « d’acte manqué », on entend populairement : « Plutôt que d’avoir fait ceci ou cela, j’aurais mieux fait de me casser une jambe… » C’est la naissance du concept « d’acte manqué » dont Freud donne toutes les explications, en 1901, dans « Psychopathologie de la vie quotidienne. » (Par ailleurs, on date fréquemment la naissance de la psychanalyse à l'année 1900, date de parution de L’interprétation des rêves, essai qui fit scandale.) Celui qui se casse une jambe, celui qui se trompe de route, de date ou d’heure signe ces (ses) actes manqués, ces (ses) lapsus…. La science populaire affirme aussi, dans son jargon : « C’est celui qui le dit qui l’est !  Et nous voici avec l’émergence du concept de « projection »… Elle dit encore : « Qui se rassemble, se ressemble. » C’est maintenant le concept « d’identification » à l’autre qui émerge. Celui, aussi, qui fait de l’humour sur un sujet précis marque bien que c’est son inconscient qui le gouverne avec toute la charge de ses blessures ainsi que de sa haine ancestrale… (Le mot d'esprit et ses rapports avec l'inconscient, Freud 1905.) Le mordant, l’humour vitriol, cet humour décapant … autant de termes qui dévoilent surtout ce qui est agit au niveau profond… au sujet de la relation au féminin autant qu’à la relation au masculin ou bien tout autre domaine humain posant de la souffrance et/ou des problèmes dynamiques (les juifs, les noirs, les jaunes, les arabes, les politiques, l’argent, le terrorisme, etc.)
Ces actes manqués commis malgré soi, ces mots d’esprit, ces blagues populaires diverses ont l'avantage d'attester d'une activité intense, courante de l'inconscient dans le sens de conflits internes non résolus…
« Du point de vue psychologique, le rire est une détente pour l'esprit. Il possède une action relaxante. C'est aussi une défense contre le stress, la tristesse et l'humeur déprimée. Pour les psychanalystes, l'humour et le rire sont un moyen de détourner la souffrance psychique et de se protéger : c'est un processus de défense, une sorte de réflexe de fuite dont la tâche est de prévenir la naissance du déplaisir. Mais Freud (le « père » de la psychanalyse) n'a rien inventé sur ce sujet, puisque au XVIIIe siècle, Beaumarchais (l'auteur du Barbier de Séville) disait déjà : « Je me presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer. »

Qu’en est-il de cet inconscient à propos du couple ?
Dans la prolongation de ce raisonnement préalable, le sujet sur lequel nous allons travailler, demande d’abord un état des lieux. La misogynie, le patriarcat, le mépris, la haine, la violence des hommes envers les femmes, la violence des femmes envers les hommes à travers l’histoire ainsi que la charge populaire inconsciente qui en résulte est assez interpellante. Une première explication psychanalytique pourrait être « la peur » du lien, la peur de l’attachement. Ou, plus archaïquement la haine de la mère en rapport à la première blessure laissée par le sevrage (deuxième séparation, la première étant l’accouchement.) Ou bien par des histoires plus dures comme la violence parentale, l’abandon pur et simple du nourrisson ou de l’enfant. En effet, le premier couple qui laisse des traces de blessure (originelle), est la première fusion symbiotique avec la mère (il y a d’abord projection de la mère sur le partenaire au début d’une relation amoureuse !). D’intra-utérine à préoedipienne, cette fusion primordiale sera mise au développement dans le chapitre : Le couple primaire « maman-bébé. »

État des lieux des humeurs et de l’humour populaire, sur les femmes, les hommes  et le couple à travers l’histoire et l’actualité
C’est dans ce cas précis, sur les femmes et sur les hommes, dans le cadre de ce travail sur le couple que nous constatons à tout le moins la force de cet inconscient à travers les boutades (violences déguisées) ou bien les traits d’humour de toute sorte (libération psychique nécessaire par mécanisme de défense : catharsis.)
« Peut-être le voit-on mieux en se tournant vers une autre excitation : l’humour (plaisanteries, comiques, esprit, ironie, caricature, sarcasme, pour suggérer un continuum d’hostilité de manière croissante). Je ne crois pas que vous puissiez raconter une histoire qui soit spirituelle, comique ou humoristique – elles sont semblables mais non identiques – dans leur manière de faire rire – sans qu’il n’y ait la caractéristique, comme dans la caricature, d’une victime implicite ou visible qui soit humiliée. » (« L’Imagination érotique telle qu’on l’observe, Robert J. Stoller, pp. 36 »)

  • « Ma femme est une menteuse ! », dit le mari énervé à un homme assis à côté de lui dans un bar.
    - Comment le sais-tu ? lui répond l'homme.
    - Elle n'est pas rentrée la nuit dernière et quand je lui ai demandé où elle était, elle m'a dit qu'elle avait passé la nuit avec sa sœur Shirley.
    - Et ?
    - C'est une menteuse, J'ai passé la nuit avec sa sœur Shirley.
(Blague populaire)
  • « L’amour, c’est l’effort que l’homme fait pour se contenter d’une seule femme. »
Paul Géraldy (1885-1983)
  • Une auto-stoppeuse est une femme généralement jolie et court-vêtue quand vous êtes avec votre femme. »
Woody Allen (XXème siècle)
  • « C’est un mec qui caresse le cul d’une femme et qui dit : Ah ! si t’avais ça dans la cervelle ! »
Coluche (1944–1986)
  • « Les femmes bêtes deviennent des bêtes dès qu’elles ne sont plus tenues en laisse par la famille, les conventions. »
François Mauriac (1885-1970)
  • « Les jambes permettent aux hommes de marcher et aux femmes de faire leur chemin.
Alphonse Allais (1854-1905)
  • « L’amour est aveugle, mais le mariage lui rend la vue. »
Lichtenberg (1742-1749)
  • « En amour, la victoire de l’homme, c’est la fuite. »
Napoléon Ier (1769-1821)
  • « Une femme est comme votre ombre. Courez après, elle vous fuit ; fuyez-là, elle vous court après.
Alfred de Musset (1810-1857)
(Concept dynamique développé par le psychanalyste Guy Corneau dans son livre « N’y a-t-il pas d’amour heureux ?)
  • «  Pourquoi la psychanalyse des hommes est-elle plus rapide que celle des femmes?
    Pas besoin de régresser en enfance, ils n'en sont jamais sortis. »
(Blague populaire)
  • « Pourquoi les femmes ne clignent-elles pas des yeux pendant les préliminaires ?
    Elles n’en ont pas le temps… »
(Blague populaire)
  • « Pourquoi les femmes choisissent-elles toujours des mecs grossiers et immatures qui passent leur temps à boire de la bière devant des matchs de foot ?
    Elles ne choisissent pas ; il n'y en a pas d'autres. »
(Blague populaire)
  • « Quel est le point commun entre les nuages et les hommes ?
    Quand ils partent, on peut espérer une belle journée… »
(Blague populaire)
  • « Une femme témoigne: Je n'ai pas eu d'enfant dans mon mariage... À part mon mari... »
(Blague populaire)
  • « Maman, pourquoi la mariée est-elle en blanc ? Parce que le blanc est la couleur du bonheur, et ce jour est le plus beau de sa vie. Alors pourquoi le mari est-il en noir ?
(Blague populaire)
  • « Avant le mariage, une femme doit faire l'amour à un homme pour le retenir. Après le mariage, elle doit le retenir pour lui faire l'amour. »
    Marilyn Monroe (1926-1962)

  • «L'amour, c'est comme le potage : les premières cuillerées sont trop chaudes, les dernières sont trop froides. »
    Jeanne Moreau (1928 -)

  • «Ce n’est pas s’unir à une femme qu’un homme redoute lorsqu’il pense à se marier ; c’est se séparer de toutes les autres.»
    Helen Rowland (1875-1950)
Jolie ou intelligente ?
Chéri, qu’est ce que tu préfères, une femme jolie ou intelligente ?
Ni l’une ni l’autre, chérie, tu sais bien que je n’aime que toi !
(Blague populaire)

Pourquoi la culture populaire de la femme est-elle aussi violemment méprisante ?
Au-delà de la blessure laissée par la mère faut-il aussi y entrevoir l’envie, l’envie du féminin, selon le concept développé par Mélanie Klein (in « Envie et gratitude et autres essais, Gallimard, collection tel , Paris, 1968 ). Peur de la mère toute puissante dans son pouvoir de vie et mort sur le bébé, sur l’enfant (plus jamais ça… barrière contre le possible attachement…) ? Rejet par l’homme de sa fascination du féminin ? L’homme, ainsi mis en face d’une autre puissance créatrice et fondatrice, se sentirait dépossédé de « sa toute puissance phallique » et ne pourrait pas contenir son admiration ? L’objet envié étant détruit ou dévalorisé (mécanismes de défense kleinien). Pour ce qui est de la femme, attaquée de toutes parts depuis des siècles, elle se venge du machisme obscène ainsi que de lourdeur cruelle d’années de mépris ainsi que de l’esclavage engendré par le patriarcat. Elle signe aussi, à l’inverse de l’homme, son envie du masculin. Par ailleurs, la dialectique habituelle dit bien : « Sexes opposés ». Cela explique bien toute la charge socio-historique de cet antagonisme. Une avancée créatrice, culturelle et qualitative serait plutôt de dire : « Les sexes complémentaires. »
Cueillant dans l’ouvrage « Bienheureuse Infidélité », les questions suivantes, Paule Salomon se positionne face à la survenue de nouveaux concepts à caractère socio-psychiques.  pp. 11 et 12 :
« Notre époque s’interroge beaucoup sur les incertitudes du couple. Cette conjonction femme/homme, qui semblait aller de soi comme fondement de la société, oscille dangereusement. Il nous faut remettre en question un certain nombre d’idées reçues. Il nous faut oser poser de nouvelles questions

  • « Le fait de vivre en couple est-il synonyme d’exclusivité sexuelle ? »
  • « L’amour est-il monogame ? »
  • « La fidélité est-elle une vertu ou un besoin de sécurité, de propriété ou encore une facilité, une lâcheté ?
  • « L’infidélité est-elle une faiblesse, une trahison ou un courage, une audace, une affirmation de soi ?
  • « Peut-on mener plusieurs relations à la fois ou au moins deux et qu’elles s’enrichissent l’une l’autre, ou y a-t-il déséquilibre, rivalité, épanouissement de l’une au détriment de l’autre ? »
  • « Quelle différence existe-t-il entre polygamie, poly-sexualité, poly-amour et poly-fidélité ? »
  • « Tout engagement est-il synonyme d’aliénation personnelle ? »
  • « L’amour s’accommode-t-il du partage ? »
  • « La jalousie est-elle un sentiment à dépasser ? »
  • « La notion de propriété privée est-elle l’ennemie de l’amour ? »
  • « Sommes-nous les héritiers d’une conception de l’amour que nous avons besoin de dépoussiérer ? »
Paule Salomon laisse entendre aussi qu’ouvrir ces questions permet de sortir de la conception manichéenne du bien et du mal. Sortir de ce clivage permettrait de penser que l’évolution humaine s’inscrit dans le monde de la nuance ainsi que de l’évolution permanente des mœurs (par progrès sociologique ainsi que tolérance humanisée, on admet bien, à notre époque, l’homosexualité qui, pour la psychanalyse, reste une perversion…). Mais, dans le cadre de ces questions d’une société dans ses mœurs ou bien dans ses nouvelles mœurs, hors tabous et, ainsi déclarées, elle ne propose pas d’angle ou de solution psychothérapeutique à un couple en souffrance… Aussi, ce n’est pas l’objet de son ouvrage ; Paule Salomon, comme elle le précise, sociologiquement, ouvre de nouvelles questions. En fait, sont-elles si neuves que cela ? Ces comportements ne sont pas l’apanage du 20ème siècle. Historiquement, tous ces comportements se sont vécus au travers des siècles. Par là même, ces questions fondatrices d’un autre raisonnement  étaient déjà posées implicitement. L’intéressant est de savoir ce que l’humanité en fait comme solutions, devenir possibles, ou forces de raisonnement selon les différentes cultures.

État des lieux sociologiques
« L’étude du couple d’un point de vue psychanalytique a été quelque peu négligée. A l’heure actuelle (1984), la famille élargie disparaît de l’horizon occidental pour être remplacée par la famille nucléaire. Prôner la disparition du modèle traditionnel du couple, voire de tout modèle de couple, a aujourd’hui bonne presse. En effet, une certaine modernité laisse planer le doute sur la valeur de l’union sentimentale comme ce fut le cas, il y a quelques décennies, pour l’union maritale. (…). L’union sentimentale et conjugale apparaît à d’autres comme le dernier rempart contre le relâchement des mœurs. (…). La sexualité sortie de ses retranchements ne déchaîne plus le scandale. Elle est devenue, au contraire, affaire courante, entreprise de consommation où le sentimental laisse place à l’efficacité orgasmique. (…) Rappelons que l’Histoire de la psychologie de ce siècle commence avec une référence au couple. C’est la libido, c’est Éros plus que la représentation qui sont au centre de l’édifice freudien. « L’amour sexuel » crée le fonctionnement psychique et par ce fait il propose pour le sujet le mode inconscient de relation par excellence. La capacité de liaison et le lien psychique s’inscrivant dans l ‘économie érotique, il est étonnant de trouver le lien sexuel prototypique – le lien du couple et l’état amoureux qui l’instaure – occuper une place marginale dans la littérature psychanalytique. » (Alberto Eiguer, in Pour une psychanalyse du lien d’alliance ; le lien d’alliance, la psychanalyse et la thérapie du couple, pp 6 et7).
D’un double point de vue psychique et socio-anthropologique (incluant l’énergie sexuelle), les hommes et les femmes sont-ils faits pour vivre ensemble en tant qu’avancée culturelle, humaine, émotionnelle et qualitative ? Je tenterai (tentation ou tentative scientifico-dialectique !) de répondre à cette question à travers ce travail.

Introduction
Le Couple étant un sujet général et trop large il sera notamment étayé sur les recherches cliniquement incontestées de Jean-Georges Lemaire. Toutefois, pour aller se rendre compte, comment la littérature générale et psychanalytique, a évolué sur ce sujet, au cours des dernières décennies, ainsi que pour le besoin de la complexité (bien que ciblé) du sujet traité, une bibliographie secondaire et tertiaire sera consultée en fonction du fil rouge constituant la table des matières.
En effet, depuis l’impact du premier ouvrage abouti sur le sujet (probablement vers les années 1960-1970), avec L’ouvrage de Jean-Georges Lemaire, « Les thérapies du couple », Éditions Payot, Paris, 1970, le sujet est devenu « à la mode ». On peut dire que le thème de la psychothérapie de couple est, dans l’air du temps.  C’est ainsi qu’il  existe pléthore de livres sur le sujet. Ouvrages allant dans tous les sens, le meilleur côtoyant le pire ; littérature scientifique très élaborée jouxtant à la littérature de « grandes surfaces ».
Il semble que Le couple a  moins honte d’avouer ses difficultés ou bien son échec ; cherchant par-là, une porte de sortie humaine et définitive ou bien une solution créative à sa reconstruction éventuelle. Un peu comme il n’est plus interdit ou bien tabou, culturellement, de divorcer. Divorce, séparation et rupture sont devenu quasi une activité normale de nos jours. La psychothérapie de couple, par contre pourra amener du sens à : soit, un concept de séparation saine (et non de rupture avec sa violence) ; soit, à une consolidation ou bien à un réel cimentage du couple. Le couple est un nouveau concept social et culturel. Antérieurement, on « pensait » famille à la place de l’idée du couple pour lui-même. La déstabilisation du patriarcat implique une redistribution dynamique entre les hommes et les femmes : sexualité, autonomie psychique, autonomie financière, droits des femmes, abolition d’un esclavage sournois « à l’intérieur de la cuisine ». J.-G. Lemaire dit : « Nous savons tous que nous sommes confrontés à des changements sociaux. (…). Je ne parle pas de la fréquence des divorces, ni des différentes formes de familles, des recompositions ; tout cela est très connu. On ne comprend pas toujours bien ce qui est sous-jacent. C’est pourquoi, il est intéressant d’évoquer un certain nombre de transformations plus discrètes, plus indirectes, plus symboliques. » Dès lors, ces changements sociaux sont-ils une valeur, une nouvelle valeur nécessaire ? Ou bien ce qui apparaît comme étant une valeur nouvelle n’est que l’antichambre de dégradations humaines ? Cette remarque de Jean-Guy Lemaire serait à mettre en lien avec les idées apportées par Paule Salomon et décrites plus haut page 4.
Le thème « Le Couple : mythe, réalité ou utopie utile », au regard de l’ensemble des ouvrages lus et décrits ici-bas, sera resserré, dans un sous-thème.
L’idée est que j’étaye mes propos sur un regard anthropologique passé et actuel ; ainsi que sur l’énergie principale : la sexualité. Sexualité vue comme besoin psychique ou comme nécessité de l’instinct. Seul l’homme, dans le règne animal, ayant des rapports sexuels hors reproduction.
Deux points de vue, l’un psychologique et l’autre, socio-anthropologique, vont confluer dans la considération des difficultés qu’un couple doit affronter sur le chemin de sa création et de sa maturation en ce qui concerne l’accord, la sérénité, la jouissance et la créativité.
Les deux points de vue convergent dans l’évidence des difficultés qu’un couple doit nécessairement affronter. Au point qu’il devient légitime de pouvoir douter de s’engager dans la réalisation du mythe du couple : l’homme et la femme, sont-ils faits pour vivre ensemble ? Le choix de la sophia-analyse, proposer avec force ce mythe, est dicté par la beauté d’un projet où les richesses de la masculinité et de la féminité puissent s’accorder et entrer en synergie créative  et l’énergie extraordinaire de la sexualité ne finit pas de s’humaniser.
J’effectuerai une analyse de l’image du couple de l’Antiquité jusqu’à nos jours à travers l’histoire ainsi qu’à la lecture de différentes cultures, je ferai donc un arrêt sur le concept de l’énergie sexuelle, pour terminer par la question posée, en tentant d’y répondre, toutefois…

Le couple : mythe, réalité, utopie utile…
Pourquoi ce titre ?
Au regard de l’avant-propos ainsi que de l’introduction de cet ouvrage, maturant l’idée de travailler sur le thème du couple, je me suis demandé sous quel angle j’allais « attaquer » ce sujet, beaucoup trop vaste. Observant le couple dans notre société, en tant qu’individu ; et, étant partie prenante de cette société, j’ai entendu et pu (en le vivant moi-même) observer tout le long de ma vie, beaucoup de comportements violents relevant de ce qu’on appelle la vie de couple. Mon premier questionnement a été de me demander si les femmes et les hommes étaient réellement faits pour vivre ensemble ? Nous savons que le système de la famille est avant tout culturel. Le couple est aussi culturel. Le couple peut être aussi un remède névrotique contre la solitude ; mais, il ne s’agit dès lors pas d’un couple créateur de lui-même, comme le propose la sophia-analyse. « Pour la plupart, le problème essentiel de l’amour est d’être aimé plutôt que d’aimer. » (Cf. l’ouvrage d’Erich Fromm, l’Art d’aimer, pp. 15). Fromm observe que la solitude est le problème existentiel le plus important de l’être humain. Pour lui, seul l’amour y apporte une réponse valable (Cf. Cahiers de Sophia-Analyse, pp. 16).
Le couple humain est-il issu d’une fable idéale imaginaire et poétique ? Correspond-t-il à une réalité vraie en tant que destinée incontournable ? Ou bien au regard de ses difficultés permanentes ainsi que de ses ingrédients psychiques, dynamiques et sexuels est-il un binôme qui se teste depuis des siècles ? Est-il un auto-modèle d’étude, qui permettrait à l’homme ainsi qu’a la femme de s’auto-modeler ou bien s’auto-modéliser  ? De mettre à l’épreuve leurs capacités d’humanisation culturelle ? Seul saut qualitatif possible pour la progression de l’humanité (utopie utile)….
Cependant, Patrick Lemoine, psychiatre, dans son ouvrage « « Séduire, comment l’amour vient aux humains, préface de Boris Cyrulnik », parle plutôt d’attractivité par les odeurs, les phéromones, le besoin de perpétuer l’espèce (programme biologique inconscient). L’homme, animal culturel, ne rassemble-t-il pas tous ses efforts pour quitter ses racines ? L’animalité, la Nature, les instincts primaires. Biologie ou humanisme culturel ?
« Depuis trop longtemps, l’homme et la femme ne parle pas le même langage. L’image de l’un ne se superpose pas à l’image de l’autre. Ange ou démon, Vierge-Marie ou sorcière, mère ou putain, l’homme vit la femme comme une menace et comme un besoin impérieux dans une ambiguïté haine-amour. La femme vit l’homme comme un oppresseur dont elle est la victime parce qu’elle s’efforce de le satisfaire, parce qu’elle tourne autour de lui et de ses besoins, parce qu’elle s’aliène en se rendant indispensable et qu’en l’aimant elle se fait aimer. L’homme veut conquérir. La femme règne sur des territoires intérieurs, l’homme règne sur des territoires extérieurs. Quel est le supérieur ? Quel est l’inférieur ? Le partage des rôles est-il inéluctable ? Des milliers d’années de civilisation ont achoppé sur ces questions. La négation ou l’usurpation des rôles ont entraîné des dépenses infinies d’énergie, des souffrances et des errances qui continuent d’alimenter tous les jeux. » (Paule Salomon, in La femme solaire, la fin de la guerre des sexes, pp. 14).

Point de vue psychologique : perspectives psychanalytiques
Le couple « primaire » mère-bébé, paradigme de toutes les relations binaires
Les cinq sens, leur histoire et ses stimulations
« Les sentiments d’un homme envers une femme sont toujours influencés par son premier attachement à sa mère. » (M. Klein, in L’amour et la haine, pp. 123). L’inverse est vrai pour la femme : les sentiments d’une femme envers un homme sont toujours influencés par son premier attachement à sa mère. C’est la première projection que les individus font l’un sur l’autre : la mère symbiotique. C’est le concept de la relation que nous appelons « relation primordiale ». C’est le concept de la relation archaïque. Grâce aux soins que la mère apporte à son enfant, elle devient sa première séductrice : ainsi la mère acquiert une importance unique, incomparable, inaltérable et permanente. Cet objet puissant d’amour, deviendra le paradigme de toutes les relations amoureuses, de toutes les relations binaires ultérieures.
Chez le nourrisson, les premières manifestations de la sexualité sont liées aux fonctions vitales. Le fait de sucer, fonction qu’il exerce d’abord pour se nourrir au sein maternel, lui apporte indéniablement du plaisir. Le nourrisson est donc capable d’actes ne lui apportant que du plaisir, et Freud nomme cela « sexualité infantile ». La sexualité infantile est diffuse. Ce sont des sensations agréables et non génitalisées. La bouche devient sa première zone érogène. La sexualité infantile exprime l’expérience du plaisir sans avoir le besoin de procréer. Nourrisson d’abord auto-érotique, tout ce qui l’entoure et son propre corps ne font qu’un et peuvent être sources de ce plaisir érotique. L’une des fonctions essentielles de la bouche est de calmer l’angoisse et de combler un vide intérieur. Souvent un traumatisme (il n’y a pas de sevrage parfait), le sevrage laisse dans le psychisme les traces de la relation primordiale. Trop peu ou trop de gratifications orales donnent naissance à la personnalité dite orale ; aussi, à une régression ou bien à une fixation orale. Ces traces d’oralité (sexualité partielle) se continueront dans la sexualité du couple. Soit en tant (sucer, lécher, embrasser le corps ou des parties du corps) que prélude comme passage vers le coït final ou bien en tant que fixation orale sur une partie « partielle » du corps : pied, anus, pénis... La spécificité de l’oralité étant la relation anobjectale, l’objet en tant que sujet  ne sera pas considéré en tant que tel.  L’objet sera utilisé en tant qu’objet non sujet ; mais, plus loin, précisément en tant qu’objet partiel, divisé, morcelé, fragmenté. Nous aurons affaire à ce que nous appelons la perversion sexuelle. Ce développement sera fait dans le chapitre : « L’importance des relations avec les objets archaïques et de leur intériorisation, dans le cadre déterminant des pulsions partielles prégénitales, notamment le sadomasochisme. » []

« L’histoire sensorielle commence par le toucher. In utero, la matrice maternelle, ferme, tiède et douce à la fois, englobe le dos, les fesses et la nuque. Ces zones resteront définitivement propices à la caresse érotique. Ensuite, le fœtus est concerné par le bloc goût-odorat. La bouche et le nez du fœtus sont inondés  d’informations issues des repas et de l’odeur de la mère. L’audition apparaît dès la vingt-septième semaine. Les sons du contexte « culturel » et familial arrivent amplifiés, déformés et amortis par le liquide amniotique. C’est à la naissance que les yeux du bébé se dessillent. Les sens rendent possible notre ouverture au monde. Relationnellement, sans eux, c’est la mort assurée, car l’homme est avant tout un animal social. » (in Patrick Lemoine, Séduire, comment l’amour vient aux humains).
« Donc, ce qui permet à un fœtus, à un bébé de vivre, c’est l’attachement à la mère relayé par les sens et la parole. C’est d’ailleurs ce même attachement, devenant plus tard attirance avant de devenir séduction, qui constitue un des principaux moteurs de l’humanité en marche. La conquête sexuelle de l’autre est le seul but de la séduction. C’est le prélude nécessaire à la prolongation de l’espèce et du groupe social. » (in Patrick Lemoine, Séduire, comment l’amour vient aux humains).
Ce développement sera fait dans le chapitre : « De la sexualité comme moteur inconscient de la prolongation de l’espèce à la sexualité comme source de plaisir légitime dans la rencontre homme-femme. »
Toutes nos histoires amoureuses paient le prix des limites qui ont pris l’origine dans cette relation mère-enfant. Quand la relation à la mère a été difficile, reste difficile aujourd’hui, c’est difficile d’avoir une belle histoire d’amour. Quand on reste fâché, cette colère se structure dans un projet que l’on appelle le projet destructeur.



Le couple en lien avec le couple symbiotique maman-bébé : objets archaïques et objets internes
Relation primordiale, objets archaïques, le lien originel serait la première histoire d’amour. C’est la frustration, la prolongation de ce lien qui devient une continuation de quête à toutes les histoires amoureuses convoitées. « L’attachement sexuel présenterait dès la naissance une activité neurophysiologique qui se maintiendrait dans l’enfance pour déborder physiquement sur l’âge adulte avec l’afflux d’hormones provoquant des réponses physiologiques à l’adolescence. » Jean-Pol Tassin, neurobiologiste, indique que « les histoires d'amour sont des éléments émotionnels dans le processus cérébral qui sont un prolongement du lien maternel. Dès la naissance, un rapport à la mère basé sur la recherche de plaisirs sensoriels se crée, explique-t-il. Avec ce premier rapport hédoniste, l'enfant au cours de son développement se bâtit ce que l'on peut appeler un « bassin attracteur » : il intègre petit à petit ses satisfactions premières et va passer sa vie à rechercher chez les autres des stimuli analogues. »
Au regard de ce lien fœtus-maman, bébé-maman, enfant-maman va se créer l’objet intériorisé que nous appellerons l’objet interne. L’objet interne étant une « vision », une « lecture » émotionnelle (l’émotion nous fait voir les choses de travers !) de celui qui l’intègre. Que cet objet soit (bon) protecteur  ou (mauvais) persécuteur (clivage), dans le clivage, l’objet positif est idéalisé ; l’objet négatif est attaqué. Ou, bon et mauvais à la fois (ambivalence), c’est dans l’ambivalence que l’on constate la réalité humaine. En fait, il n’y a qu’une mère ; des fois elle frustre, des fois elle gratifie. C’est cependant avec cet objet interne intériorisé que l’individu va entrer en relation dans ses histoires amoureuses sur lesquelles il projette (projection, mécanisme de défense névrotique, opération psychique qui permet au sujet de localiser à l'extérieur ce qui se situe en fait à l'intérieur de lui. Il attribue donc à une autre personne les affects dont il ne peut se protéger et qu'il refuse de reconnaître en lui-même). Donc, l’objet interne ne correspond pas à l’objet réel (sa mère telle qu’elle était ou sa compagne telle qu’elle est réellement). Au passage, je précise que c’est avec cet objet interne qu’il va projeter tout le concept « Mère » sur le monde environnant. Ce sera, au-delà, de la relation à l’autre, de projeter sa vision émotionnelle intériorisée, sur le monde entier ou sur tous les événements qui occupent sa vie. De ces projections négatives (paranoïaques) ou positives (créatives), l’individu entrera en relation avec une femme, avec un homme ou bien avec le monde dans le cadre de son angoisse ou de son bien-être : dans la formation d’une spirale négative qui se renforce et s’étouffe d’elle-même ; ou bien dans la formation d’une spirale positive qui s’ouvre de plus en plus en se nourrissant d’elle-même créativement.
Force est de constater que sur le plan psychique, la psychanalyse considère que les premières relations parents-enfants sont déterminantes dans l'esprit d'une personne et de sa perception de l'amour. Les relations mère-fils ou père-fille, notamment, sont particulièrement marquantes. Bien que pour la fille, la première relation d’amour est quand même la mère : son premier objet interne sera donc bien sa mère et non son père, car c’est d’abord sa mère, qu’elle projettera sur son compagnon, au début d’une relation amoureuse. Ils voudront l’un et l’autre, que l’un et l’autre soit la mère de l’autre et de l’un. Soit espérer retrouver la mère positive primordiale avec les attentes que cela présume ; soit, projeter la mère négative intériorisée, avec les conflits que cela suppose… D’où les difficultés dynamiques ainsi que relationnelles à l’intérieur de chaque couple qui « utilise » ses (ces) projections (-là). Ce développement sera fait dans le chapitre : « Le projet de couple doit payer un prix fort pour traverser le mécanisme massif de la projection. »
« L’amour que l’on porte à une personne ou un objet naîtrait par ce qu'il nous apporte ou est susceptible de nous apporter. « Aimer » ne serait autre qu'une façon inconsciente d'avouer sa propre impuissance à l'autonomie pour un besoin particulier à un moment donné. Besoin d’aimer ou besoin de se sentir aimé ne serait autre qu'un besoin égoïste, qu'une attente de la personne qui pourrait combler les « manques » immatériels ou matériels que nous ne serions pas capables de satisfaire par nous-mêmes. L’idée est qu’il faut avoir traversé sa propre solitude (générer sa propre autonomie) pour ensuite aller chercher une compagne de route. Cette compagne existera alors dans une relation vraie, et non instrumentalisée pour combler un manque qui est « vivre (et dépasser) son besoin d’union symbiotique. » (Cf. Cahiers de Sophia-Analyse n°1)
Dans ce type de situation, « Aimer » ou dire « Je suis amoureux (se) », serait une façon inconsciente de dire : « J’espère que la personne pour laquelle j’éprouve des sentiments amoureux m’apportera les choses que j’attends d’elle ».
Tant que l’on sent chez la personne aimée la présence des choses que l’on attend d’elle, le sentiment perdure, mais si la personne aimée perd ou ne dispose pas d’une partie de ce que l’autre attend, le sentiment d’amour s’estompe ou s’éteint. C’est à partir de ce moment que le couple devient un véritable chantier ouvert et de mise au travail pour le couple, comme le propose la sophia-analyse. (Le fait est que l’opposé de l’amour, ce n’est pas la haine mais bien l’indifférence. Avec la haine, nous restons en lien avec la mère défaillante). Cela sera mis au développement dans le chapitre : "Les richesses de la masculinité et de la féminité puissent s’accorder et entrer en synergie créative."

L’Amour  ou le sexe de l’autre ?   
« J’ai bien eu du mal à trouver l’histoire du mot. Celle de la personne amoureuse a été facile à trouver, écrite par les romanciers, les poètes et les psychanalystes. (…). Quant au mot Amour, il n’est pas français. Issu du latin, Amor (-oris) il devrait logiquement donner Ameur, comme Dolor a donné Douleur. Éclate alors le scandale, car « le mot Ameur existe dans quelques dialectes du français où il prend le sens de rut des animaux »… C’est l’institution religieuse occitane qui a transgressé les lois de la phonétique pour introduire le langoureux  « -our » de l’Amour, et ajouter ainsi  de l’érotique au rut, car l’histoire du mot pose le problème du « désir » animal et de l’érotique. »  (Cf. Boris Cyrulnik, Sous le signe du lien, pp. 166, 167).
« La flambée hormonale de la puberté va mettre à feu la mémoire biologique du premier amour maternel et des premiers apprentissages sexuels. Les hommes n’échappent pas au rut. L’amour c’est autre chose, une réaction qui permet de transfigurer la loi biologique du rut, la loi phonétique de l’ameur et de transmuer l’hormone en représentation. L’Église s’y est beaucoup intéressée, puisqu’elle a pour enjeu de séparer l’âme et le corps. » (Cf. Boris Cyrulnik, Sous le signe du lien, pp. 168).  (En grande rédemptrice de la castration, haïssant ainsi, pour le bien public, le pénis du Malin fourrageant à tous vents, note de Patrick Fraselle)
« L’amour désignerait cette force affective qui nous pousse vers un objet : la mère de l’amour maternel, le déclencheur sexuel du rut, l’attraction passionnée pour la montagne, les idées, ou pour soi-même. (…) Le rut animal « l’Ameur » trouverait ses racines biologiques dans la flambée hormonale qui déclenche les comportements de recherche sexuelle. L’objet adéquat est rencontré, c’est lui qui, à son tour déclenche le comportement sexuel, permet l’accrochage sensoriel des partenaires, met en place la spirale interactionnelle où chacun provoque la séquence gestuelle de l’autre et facilite la synchronisation des désirs…. jusqu’à ce que l’extinction s’ensuive… (…) ». (Cf. Boris Cyrulnik, Sous le signe du lien, pp. 167).
« Le rêve de vivre en couple un jour cache un projet inconscient qui est de créer une symbiose parfaite. Récupérer une symbiose car nous n’avons jamais pu accepter une séparation majeure : celle du bébé avec la mère, la fusion originelle. » (Cf. Luis Aquino, cours de psychothérapie de couple).

L’odeur de l’amour
« Il y a trois critères pour savoir si une personne qui nous intéresse de loin peut devenir celle que l’on va aimer :
  • d’abord, il ne faut pas se raconter d’histoire sur l’attirance que l’on ressent pour l’autre. Le trouve-t-on vraiment attirant ? A-t-on envie de le regarder, de le toucher, d’être à ses côtés ? Ou bien a-t-il un défaut qui nous saute aux yeux constamment et qui nous gêne ? Un sourire qui nous paraît faux, des gestes brusques, une manière désagréable de manger. L’attirance n’est pas l’amour, certes, mais c’est un solide début.
  • Ensuite, il faut pousser plus loin l’exigence.  Aime-t-on le contact de sa peau, le goût de son corps, et, surtout, son odeur ? C’est essentiel, parce qu’elle ne changera pas.
  • Et puis, bien sûr, il y a l’échange. C’est l’échange émotionnel qui compte. Nous les primates, notre nourriture affective, c’est le contact intime avec l’autre. Chez les singes, pour manifester son intérêt, on s’épouille. Chez les humains, ce même élan se manifeste différemment, mais c’est tout aussi important. Lorsque que l’on rencontre un partenaire possible, il faut faire attention à deux sous-questions : vous pose-t-il/elle des questions sur vous ? Et quand vous lui répondez, écoute-t-il/elle vos réponses ? Il ne faut sans doute pas négliger les réflexes profonds de notre cerveau animal. » (David Servan-Schreiber, in Psychologies, Les pensées, les relations, les énergies qui aident à guérir, pp. 38).
« Il semble que la motivation sexuelle soit d’autant plus intense qu’il y a eu carence affective. Maos comme sa socialisation s’est mal faite, l’inhibition est aussi forte que le désir. » Cf. Boris Cyrulnik, Sous le signe du lien, pp. 159).
La famille est un lieu riche en relations amoureuses : amour conjugal, amour maternel et de manière plus générale, parental, amour filial, fratrie.
L'importance de l'affection des membres d'une même famille entre eux est illustrée par l'émotion vécue dans les grands évènements tels qu'une naissance, un mariage, un succès, une épreuve, un accident, un décès.
L'amour peut donc, être perçu essentiellement comme la quête d'un manque.

L’importance des relations avec les objets archaïques et de leur intériorisation, dans le cadre déterminant des pulsions partielles prégénitales, notamment le sadomasochisme.
« Le discours sur la perversion prend son départ au niveau du comportement. Nous sommes allés à la rencontre de l’histoire pulsionnelle et relationnelle de l’être humain qui a pu perturber soit l’identification sexuelle, soit la centralité de la fonction génitale dans la sexualité, soit le but de la jouissance, là où elle a été substituée par la souffrance physique ou morale érotisée. » (Luis Aquino, La perversion, Les actes du colloque, exposé pp.3).
Sexualité (infantile) archaïque, le nourrisson étaye le plaisir sexuel sur les pulsions d’autoconservation. La bouche, l’anus, l’épiderme, la cuirasse musculaire sont donc des zones devenues très érotisées, très érogènes. Dans l’étiologie des perversions, la mère débordant négativement son rôle peut aussi fixer son enfant dans les pulsions partielles, comportement maternel ayant des attitudes de complicité et de séduction envers l’enfant. (baiser sur la bouche, dormir avec lui dans le lit conjugal alors que le père dort au salon, elle se déshabille devant son enfant, etc.). Dans cette sexualité narcissique, le tiers séparateur (le père est exclu) ne joue pas son rôle. Relation duelle imbibée de sexualité infantile, la mère laisse ainsi croire à l’enfant qu’il est le partenaire idéal… L’enfant me pourra investir le père génital et son pénis. L’enfant restera bloqué au stade pré-génital : étayage des pulsions partielles.
Conséquence : perversion, forme érotique de la haine est un fantasme généralement mis en acte. Cet acte est utilisé comme acte sexuel complet et différent de l’acte normal. Il est nécessaire à la jouissance totale. Motivé par l’hostilité et le désir de vengeance destinés à transformer le traumatisme infantile en triomphe adulte.
Au premier degré du regard psychanalytique, la perversion est la déviation des tendances naturelles des instincts due à des troubles psychiques. Sous un autre angle elle n’est que la résurgence des stimulations partielles érotiques archaïques que nous décrivons plus bas. On ne devient pas pervers, on le demeure… (« L’enfant est un pervers polymorphe. », Freud)
L'objet partiel est un type d'objet visé par les pulsions partielles sans que cela implique qu'une personne dans son ensemble, soit prise comme objet d'amour. Il évite ainsi la relation à l’autre, avec l’autre. Il s'agit principalement de parties du corps réelles ou fantasmées (sein, chaussures ...) et de leur équivalent symbolique. L'objet partiel est notamment l'enjeu du processus d'incorporation (oralité).
Au stade oral, premier stade de l'évolution libidinale, le plaisir sexuel est alors lié de façon prédominante à l'excitation de la cavité buccale et des lèvres qui accompagne l'alimentation. L'activité de nutrition fournit les significations électives par lesquelles s'exprime et s'organise la relation d'objet. Ainsi par exemple, la relation d'amour à la mère sera marquée par les significations : manger, être mangé. Les pulsions (de vie et de mort) s'expriment à travers les zones érogènes comme la peau, la bouche. Elles donnent lieu à des représentations partielles de l'objet. Ce sont les pulsions orales de succion et de cannibalisme.
Le stade anal est le stade de la bisexualité (avoir des dispositions à la fois féminines et masculines, à la fois passives et actives dans le cadre du tandem rétention-expulsion) du fait du caractère bisexuel de l'excitation anale. Le masochisme peut s'exprimer au stade anal par la violence que s'inflige l'enfant dans la rétention. C'est un retournement de l'agressivité sur soi : le plaisir est atteint dans la souffrance. Chez l'adulte, cela correspond à une régression au stade anal où la punition était recherchée pour le plaisir. Une bonne relation avec la mère permet à l'enfant de tirer satisfaction de l'expulsion du boudin fécal en ayant l'impression de produire quelque chose de bon. Si les relations avec la mère sont plutôt défavorables, les matières fécales sont dépréciées, l'anal devient symbole de défenduLa rétention est vécue comme une opposition à la mère et l'expulsion comme une projection d'agressivité. L'enfant exhibe ses organes génitaux. C'est un phénomène de défense et de réassurance contre l'angoisse de castration. Ce phénomène se fixera dans certaines formes adultes de perversion (voyeurisme – exhibition). Ce sont les pulsions anales incontinentes du nourrisson et rétention-expulsion, sadique-anales du jeune enfant qui capte musculairement son anus ainsi que sa fonction antinomique et duelle.
Les pulsions phalliques représentent la compétition, la rivalité (Cf. Oedipe). Mais aussi, la masturbation (La tension suscite le comportement de l'enfant qui recherche l'objet – pénis - susceptible de l'apaiser ou de la satisfaire), l’exhibition. Dans le stade phallique, les pulsions partielles sexuelles de l'enfant ont pour objet partiel l'organe génital. La génitalité est la forme la plus élaborée de la sexualité à laquelle l'enfant accède par l'Oedipe et qui va intégrer les formes partielles de la sexualité infantile. Les pulsions partielles prégénitales (orales, anales, phalliques) se rassemblent par la génitalisation grâce à la relation d'objet triangulaire œdipienne.
Généralités sur les perversions avant de développer leurs dynamiques au sein du couple
D’abord considérées comme maladie et dégénérescence, l’expérience montre, quand il s’agit des moins graves, que les perversions sont rarement absentes de la vie sexuelle des sujets normaux. Cependant certaines perversions semblent si éloignées de la normale qu’on ne peut que les qualifier de pathologiques. Particulièrement celles où l’on voit la pulsion sexuelle surmonter une certaine résistance (pudeur, dégoût, douleur). Par exemple : lécher des excréments, violer des cadavres… Il n’y a pas forcément chez ces sujets des anomalies graves ou des symptômes de maladie mentale. Pour ce qui est des perversions les plus répugnantes, Freud dit qu’elles accusent le mieux la participation psychique dans la transformation de la pulsion sexuelle. D’où sa remarque : « La toute-puissance de l’amour ne se manifeste jamais plus fortement que dans ses égarements. » Et de conclure, la pulsion sexuelle doit lutter contre certaines résistances d’ordre psychique (pudeur, dégoût). Nous pouvons supposer que ce sont là des forces pour maintenir la pulsion dans les limites de ce que l’on appelle « normal ». Cela nous donne à penser que la pulsion sexuelle n’est pas une donnée simple mais qu’elle est formée de plusieurs composantes. Freud dit vers la fin de son premier essai : « La névrose est le négatif de la perversion. » Chez le névrosé il y aurait refoulement et non chez le pervers chez qui il y a passage à l’acte. Lorsque la tendance perverse se porte vers la cavité buccale et l’orifice anal, le rôle de la zone érogène est évident : celle-ci se comporte comme une zone de l’appareil sexuel. Toutefois dans le cas du voyeurisme, c’est l’œil qui devient zone érogène ; tandis que, quand la douleur rentre en jeu, c’est l’épiderme qui fonctionne comme zone érogène. Chez tous les névrosés sans exception, on constate dans l’inconscient des velléités d’inversion, des tendances à fixer la libido sur une personne de leur sexe. On trouve dans l’inconscient, dans les cas des psychonévroses, une tendance aux transgressions anatomiques, particulièrement celle qui donne aux muqueuses anale et buccale une valeur génitale. Quand il existe dans l’inconscient une pulsion partielle liée à une pulsion partielle contraire, cette dernière, elle aussi, est toujours agissante. Toute perversion active s’accompagnera de la perversion passive : le voyeur est en même temps exhibitionniste, le sadique est en même temps masochiste. Joël Dor dit : « De nos jours, les perversions, font l’objet d’une approche sémiologique et étiologique inacceptable parce que fondée sur des critères moraux, sociaux et médico-légaux. »
Sur le plan socio-historique Freud s’attaque aux deux écrasants tabous d’une société hantée par l’horreur du sexe. D’abord en affirmant l’existence déterminante pour la vie sexuelle, d’unesexualité infantile ; ensuite, décrivant dans un langage concret et précis, les perversions sexuelles. Ce qui jeta un tel opprobre sur l’ouvrage était que Freud insista sur le fait que : « Le but de la sexualité n’est pas la procréation. La sexualité humaine n’est au service que d’elle-même, elle échappe à l’ordre de la nature. Elle est pour ainsi dire contre nature. » (Cf. pp 10 et 11 des Trois essais sur la sexualité, Freud). Ainsi, par l’affirmation d’activités sexuelles détournées de la procréation, Freud s’attaque sans concession à un faux savoir obscurantiste… et dit « à la science (biologique), à la morale (religieuse) et à l’opinion populaire qu’elles se trompent.» En d’autres termes Freud réhabilite le plaisir. Il adoptera sciemment dans son ouvrage un ton polémique pour stigmatiser les erreurs et inexactitudes existantes : « l’opinion populaire ne connaît l’instinct sexuel qu’à partir du moment physiologique de la puberté, comme réponse à un besoin naturel dont l’objet unique serait l’autre sexe, et le but, l’union par le coït.» (Cf. pp 12, source idem). Il ira plus loin. Il affirmera que la sexualité infantile exprime l’expérience du plaisir et non pas le besoin vital de procréer.
"C’est la recherche de sensations agréables, un plaisir prégénital, non coïtal, non pro-créationnel, une poussée d’énergie psychique visant l’obtention du plaisir. Ces pulsions sexuelles, au cours du développement de la sexualité infantile, sont des pulsions partielles puisqu’elles se soutiennent toutes d’une déviation quant à l’objet de la pulsion (stade oral : succion, sadique-anal : rétention et expulsion, phallique : masturbation). C’est ce qui fait dire à Freud que l’enfant est un pervers polymorphe (jouissant partiellement mais totalement de zones distinctes et clivées). L’enfant passant par tous ces stades. Dans cet ouvrage Freud va introduire les deux termes. L’objet sexuel, la personne qui exerce l’attrait. Le but sexuel, l’acte auquel pousse la pulsion. La perversion étant la déviation pathologique des tendances, des instincts, elle se traduit par des troubles du comportement. En d’autres termes, la perversion serait une régression à une fixation antérieure de la libido ; c’est partialiser les zones érogènes. Freud constatera que par rapport aux deux pôles : objet et buts sexuels, de nombreuses déviations existent. Il cherche à établir le lien qui existe entre ces déviations et l’état de chose normal. En découvrant la sexualité infantile, la psychanalyse a étendu par là même la notion de sexualité au-delà de la seule génitalité. La théorie freudienne de la sexualité infantile se situe au cœur de la pensée psychanalytique."
Les déviations se rapportant à l’objet sexuel - l'inversion

Le comportement dit « normal » voudrait qu’une personne soit attirée sexuellement par une personne de l’autre sexe. Et pourtant, il y a des êtres pour lesquels ce n’est pas le cas, c’est la relation homosexuelle ou l’inversion. Il existe différents comportements des invertis :

  1. Les invertis absolus : ne s’intéressent qu’aux individus du même sexe. Les autres les laissent indifférents ou provoquent une aversion.
  2. Les invertis bisexuels : s’intéressent aux deux sexes.
  3. Les invertis occasionnels : influencés par les circonstances extérieures.
Certains invertis trouvent cet état normal. D’autres sont en révolte contre leur inversion. Pour certains, l’inversion est présente depuis toujours. Pour d’autres, elle s’est manifestée avant ou après l’adolescence, voir après une expérience difficile. L’inversion peut perdurer ou osciller vers un objet sexuel normal, de manière périodique ou définitive…

Les déviations se rapportant au but sexuel
Rappelons que les perversions définies par Freud entrent dans un système technique de comparaison entre l’union par le coït et l’objet partialisé. La caresse partielle n’étant pas le but mais devant bien être le moyen transitoire placé dans le contexte des préliminaires excitatoires pour arriver au coït. Si la permanence du but pour arriver à la jouissance est la seule relation à une partie du corps, il y a perversion. Il y aurait une hiérarchie des perversions. Exemple, le baiser (acte partiel) considéré techniquement comme perversion est un fait physique accepté par la norme de tous les amoureux du monde. D’où l’idée d’admettre que certaines perversionssont rattachées à la vie normale. Il y aurait donc une hiérarchie des perversions. Le but sexuel normal est l’union des parties génitales dans le coït conduisant à la résolution de la tension sexuelle. Les perversions consistent en phénomènes de deux ordres : 

  1. des transgressions anatomiques quant aux parties destinées à accomplir l’union sexuelle ;
b) des arrêts à certains rapports intermédiaires qui, normalement, doivent être franchis rapidement pour atteindre le but sexuel final. La transgression anatomique prend naissance dans la surestimation de l’objet sexuel. La valeur qui lui est attachée ne se limite pas aux parties génitales mais s’étend au corps entier de cet objet. La surestimation est aussi d’origine psychique et se traduit par un aveuglement amoureux et une soumission facile aux jugements de l’autre. La crédulité provoquée par l’amour étant la source de l’autorité de l’un sur l’autre. La surestimation s’accordant mal avec un but sexuel limité à l’appareil génital conduit à faire servir d’autres parties du corps à l’usage sexuel. L’usage de la bouche et de la langue comme organes sexuels est considéré comme perversion. Le dégoût pouvant éloigner de pareils buts sexuels s’oppose à la surestimation libidinale de l’objet. Généralement, les exclusions par le dégoût ne comprennent pas l’appareil génital mais parfois les organes génitaux peuvent engendrer le dégoût. La force de la pulsion sexuelle se plaît à passer outre ce dégoût. Le dégoût pour l’usage de l’orifice anal comme but sexuel est la marque du sceau de la perversion. Le rôle sexuel de la muqueuse anale n’est pas limité aux rapports homosexuels. L’extension de la sexualité à ces autres parties du corps affirme la volonté de s’emparer totalement de l’objet. Le fétichisme est le cas dans lequel l’objet sexuel normal est remplacé par un autre en rapport avec lui et qui n’est nullement approprié au but sexuel normal ; le substitut de l’objet sexuel est souvent une partie du corps peu appropriée à un but sexuel : cheveux, pieds… ou un objet inanimé : vêtements, slips, bottines… La transition vers la sexualité normale est dans la surestimation de l’objet sexuel, nécessité psychologique qui s’empare de tout ce qui est associé à l’objet. C’est pourquoi un certain degré de fétichisme se retrouve dans la période amoureuse de l’amour normal. L’aberration pathologique, c’est quand le fétiche devient objet de fixité et remplace le but normal. Le choix du fétiche serait l’influence persistante d’une impression sexuelle ressentie dans l’enfance. Le pied ainsi que la chaussure sont des symboles phalliques et sexuels. L’adoration du pied pouvant être l’adoration du pénis symbolisé. C’est la symbolisation d’une association d’idées inconscientes qui amène le choix du fétiche. Pour aller plus loin, la psychanalyse fait apparaître le fétiche comme le substitut du phallus de la mère auquel a cru le petit enfant et auquel il ne veut pas renoncer car cela l’expose à l’angoisse de castration. Le sadomasochisme est la forme de perversion la plus fréquente. Le but est actif-passif. Le plaisir est procuré par la douleur, la cruauté, l’humiliation et la soumission. Cette dynamique est autant physique que psychique. On retrouve l’élément sadique dans la vie normale car ce serait le développement excessif de la composante agressive de la pulsion sexuelle. La biologie dit que pour vaincre la résistance de l’objet, il faut autre chose que de la séduction. Un minimum d’agressivité et de passivité est nécessaire à la vie sexuelle : c’est le couple actif-passif. Il y a perversion, encore une fois, quand les composantes sadiques ou masochistes, traitées à l’excès, permettent seules d’atteindre la jouissance. En ce sens, le masochisme, dans sa passivité paraît plus éloigné encore du but sexuel normal que le sadisme. Mais ce couple actif-passif est le plus proche des caractères fondamentaux et opposés qui constituent la vie sexuelle. Cette perversion est caractérisée par le fait que sa forme active et passive se rencontre chez le même individu. Le sadique étant toujours en même temps un masochiste. De plus l’opposition sadique-masochiste ne peut être expliquée par le seul élément d’agression car elle met en lumière aussi la bisexualité qu’il y a en chacun de nous.

Nous distinguons trois formes de destinées sexuelles :
La relation dite normale
Assurant la santé de la vie sexuelle, l’intrication créative des deux grands courants sexuels : la passivité, la tendresse et une saine agressivité entre individus de sexes opposés menant au coït complet et éventuellement à la procréation.
L’inversion
C’est la relation homosexuelle.
La perversion.
Inversion et perversion ont deux traits communs :
a) l’une et l’autre rendent la reproduction impossible ;
b)  elles correspondent toutes deux à des troubles de la relation dite normale. Même si l’homosexuel homme se clive de sa partie masculine et la lesbienne se clive de sa partie féminine, l’objet sexuel reste une personne totale ce qui n’est pas toujours le cas chez le pervers. Le pervers choisit des objets qui peuvent être totaux mais qui ne sont plus prêts à la reproduction, ne le sont plus ou bien ne le sont pas : pédophilie, nécrophilie, gérontophilie, zoophilie. L’objet pourrait convenir à la reproduction mais il se confine exclusivement aux fonctions partielles : battre, être battu, regarder, se montrer. L’objet sexuel n’est plus une personne totale. C’est l’érotisation d’une partie de la personne qui ne sert pas à la reproduction, la bouche, l’anus, le clitoris, le pied, etc. En allant plus loin, on découvre que l’objet n’est plus un être humain ni une partie du corps mais un produit excrémentiel : selles, urine, sperme ou bien un objet porté : chaussures, gants, vêtements féminins, etc. Dans la sexualité dite normale certaines pulsions partielles interviennent dans les préliminaires et accroissent l’excitation. Dans les perversions, elles constituent le tout de l’activité sexuelle. C’est ainsi qu’il n’y aurait pas perversion si cela relève du fantasme ou d’une expérience non répétée systématiquement. C’est là, la grande différence entre l’érotisme et ses variantes ludiques prises comme excitation occasionnelle et le pervers sexuel qui ne sait plus avoir de relation autrement ? Et dans « autre-ment », nous lisons autrel’autre, c’est-à-dire, la relation à l’autre dans sa totalité…
On pourrait penser que la pulsion et l’objet sexuel sont intimement liés. Il est permis de croire que la pulsion sexuelle existe d’abord, indépendamment de son objet, et que son apparition n’est pas déterminée par des excitations venant de l’objet.
Dans beaucoup de circonstances et pour un nombre surprenant d’individus, le genre et la valeur de l’objet sexuel jouent un rôle secondaire. Il faut en conclure que ce n’est pas l’objet qui constitue l’élément essentiel et constant de la pulsion sexuelle.
Nous découvrons le monde à travers des pulsions partielles qui s'appuient sur des fonctions organiques que l'être humain détourne en partie pour se constituer un espace de jouissance propre, fondé notamment sur une remémoration des sensations corporelles archaïques.
Selon Karl Abraham, médecin et psychanalyste
« Plus on s'intéresse au problème de la sexualité, plus la pulsion génitale apparaît complexe. Elle comprend, en dehors de l'amour hétérosexuel « normal », toute une série d'aspects « pervers ». La sexualité de l'enfant nous offre le chaos, haut en couleur, de ces pulsions: elle est « perverse polymorphe » (Freud). Ce n'est que peu à peu que les « pulsions partielles » se subordonnent à la pulsion hétérosexuelle. Elles succombent au refoulement et à la sublimation. De là naissent la honte et le dégoût, les sentiments moraux, esthétiques et sociaux, la pitié et l'horreur, la piété de l'enfant vis-à-vis des parents, la sollicitude des parents pour l'enfant. Les activités artistiques et scientifiques sont en grande partie une sublimation d'énergies sexuelles. »
« Chez l'individu normal, la composante homosexuelle de la pulsion sexuelle est sublimée. Les sentiments d'entente et d'amitié entre hommes sont dépouillés de tout caractère sexuel conscient. Un contact tendre avec d'autres hommes éveille la répulsion chez l'homme sain. L'alcool les supprime. Au cours d'une beuverie, les hommes tombent dans les bras les uns des autres et s'embrassent. Ils se sentent liés par des liens particulièrement intimes, ils en sont touchés jusqu'aux larmes et se tutoient facilement. A jeun, ils qualifient ce comportement de «femelle». Certains faits d'actualité attirent notre attention sur ces «amitiés masculines anormales». Or quiconque n'est pas aveugle a pu observer dans chaque estaminet ces manifestations sentimentales qui sont stigmatisées comme pathologiques ou immorales et y a senti passer un souffle d'homosexualité. La composante homosexuelle que l'éducation nous a fait refouler et sublimer réapparaît régulièrement sous l'effet de l'alcool. »
« Parmi les pulsions partielles la signification du couple voyeurisme-exhibitionnisme sexuels n'a été estimée à sa valeur que par Freud. La curiosité sexuelle leur est étroitement liée. La sublimation de ces pulsions donne lieu à la honte. L'enfant, au cours des premières années, ne connaît pas le sentiment de la honte; il l'apprendra. Si cette sublimation ne se produit pas, il s'ensuit une perversion (voyeurs, exhibitionnistes). Cette honte ne concerne pas seulement la nudité physique, elle règle la vie en société, la conversation, etc. L'alcool supprime ces limitations. La blague obscène qui selon l'excellente analyse de Freud représente une impudeur psychique est inséparable de l'absorption d'alcool. Un autre couple de pulsions partielles - également caractérisé par le rapport activité-passivité tend à atteindre la suprématie sur l'objet sexuel ou bien à sa soumission. La sublimation de ces tendances donne lieu aux sentiments de pitié, d'horreur, etc. Par défaut de sublimation, nous avons alors les perversions sadiques ou masochistes. Il est à peine besoin de mentionner le nombre des actes de brutalité qui se font sous l'effet de l'alcool. Cependant, les pulsions partielles refoulées ne s'expriment pas obligatoirement sous cette forme crue. Nous les reconnaissons également lorsqu'elles sont plus larvées. De tout temps, on a connu les us et coutumes du boire; le roi des libations d'un festin en est le maître incontesté. Je rappelle le « bizutage » estudiantin, toujours en vigueur, avec son obligation de boire et le plaisir souverain avec lequel l'étudiant plus âgé force le jeune à boire et à se soumettre aveuglément à ses ordres. Je sais que je heurte par ma conception de ces usages; c'est pourquoi je ferai remarquer que les coutumes estudiantines de beuverie se sont développées progressivement jusqu'aux formes civilisées actuelles à partir de conduites d'une incroyable brutalité. »
« La pulsion sexuelle rencontre une autre limite. Au cours d'une évolution normale, l'enfant transfère d'abord sa libido sur la personne de sexe opposé de son entourage immédiat: le garçon sur la mère et sur la sœur, la fille sur le père et le frère. Il fallut un développement très long de la civilisation jusqu'à ce que les parents les plus proches fussent exclus du choix objectal. Le refus de l'inceste conduisit à la sublimation de l'amour parental. L'amour de l'enfant pour les parents devint la pieuse vénération des parents. Chaque enfant doit refaire cette évolution. A un certain moment, il transfère ses souhaits sexuels en éveil sur le parent de l'autre sexe. Ces émotions sont refoulées de même que notre morale repousse un penchant non sublimé du père vers la fille. »
Il est aisé de comprendre que les pulsions partielles font partie de la sexualité infantile. Au départ, elles fonctionnent indépendamment les unes des autres. Elles sont spécifiées par leur source au niveau du corps : la pulsion orale et la pulsion génitale. Au moment de la mise en place de la structure subjective, quand l’enfant connaît la différence des sexes et va accepter la castration, la pulsion sexuelle va alors regrouper les pulsions partielles sous le primat du phallus, la différence des sexes étant reconnue. L’activité libidinale en action dans le triangle œdipien par le biais des pulsions partielles va se modifier sous l’effet du refoulement du lien originaire à tendance fusionnelle. Les motions pulsionnelles de la sexualité infantile, bien que refoulées, resteront présentes dans le fantasme sous forme de représentations structurées autour d’un couple d’opposés : actif-passif, sadique-masochiste, voir-être vu. C’est alors seulement que la pulsion sexuelle se manifeste par l’attractivité du parent de sexe opposé, de l’identification et de la rivalité au parent de même sexe.
Bien que nécessaires au début de la vie du bébé, les pulsions partielles sont unifiées à la période phallique et subissent l’action du refoulement (honte…). Possiblement actives dans une sexualité complète, elles sont présentes ou partiellement refoulées.
« Le désir de faire souffrir l’objet sexuel – ou la tendance opposée – est la forme de perversion la plus fréquente et la plus importante de toutes ; elle a été nommée par Kraft-Ebing sadisme ou masochisme selon qu’elle est active ou passive. Il est aisé de retrouver les origines du sadisme dans la vie normale. La sexualité de la plupart des hommes contient des éléments d’agression, soit une tendance à vouloir maîtriser l’objet sexuel, tendance que la biologie pourrait expliquer par la nécessité pour l’homme d’employer, s’il veut vaincre la résistance de l’objet, d’autres moyens que la séduction. Ce qui caractérise avant tout cette perversion c’est que sa forme active et sa forme passive se rencontrent chez le même individu. » (Freud, Trois essais sur la théorie de la sexualité, pp. 45 et 47) Par le simple fait de bander ou pas, l’homme joue sa motion agressive en tant que symbole phallique (le phallus est un arrimage émotionnel positif pour un homme non castré psychiquement). Ensuite, il lui faut encore assez d’agressivité sexuelle pour pénétrer sa partenaire en tant que pénis actif réel. A la femme, assez de soumission passive « masochiste » pour se laisser pénétrer. Le couple sado-maso est le couple le plus fusionnel et qui dure le plus longtemps faisant référence à la situation actif-passif de la mère et de son bébé. Pour garder la santé sexuelle du couple, tous les jeux sexuels seront permis dans les limites de chacun ; et ce, dans le cadre d’un accord commun et d’une bonne alliance humaine, créatrice et positive. La sexualité  appartenant à ceux qui la pratique.
« Le caractère sadique a peur de tout ce qui n’est pas certain et prévisible (structure obsessionnelle, ndlr), de tout ce qui peut provoquer une surprise qui l’obligerait à des réactions spontanées et originales. » (Erich Fromm, in La passion de détruire, pp.304).
Le besoin de se soumettre est enraciné dans le masochisme. Le sadisme et le masochisme, qui sont invariablement liés, engendrent des comportements opposés, mais ils sont en réalité les deux facettes distinctes d’une même situation fondamentale : le sentiment de l’impuissance vitale. Le sadique et le masochiste ont tous deux, pour ainsi dire, besoin d’un autre qui les « complète ». Le sadique fait de cet être un prolongement de lui-même ; le masochiste se fait lui-même le prolongement d’un autre être. Ils cherchent tous deux une relation de symbiose indéfectible (référence maternelle).
Pathologie ou fantasme ? Nous parlerons de perversion sexuelle si nous faisons référence au comportement habituel et « dégénitalisé » d’une personne plutôt qu’à une manifestation des fantasmes (salubrité psychique) ou à un comportement occasionnel dans la vie sexuelle.

Pulsions partielles ou corps entier comme lieu de noblesse idéalisé ? 
Il m’arrive de fréquenter des prostituées. Je suis interpellé par « leurs codes sexo-comportementaux ». Les péripatéticiennes que je rencontre, parlent, dans leur jargon de « fellation ou bien de complet » ou bien de « pipe ou de l’amour ». La fellation, sexualité partielle isolée s’il en est (le but n’est pas le coït), participe donc bien de cette fameuse pulsion dite partielle et ramenée à une seule zone du corps.
 Le complet (ou l’amour) décrit, selon chacune d’elles, leurs éventuels programmes :
  1. Dans l’ordre, fellation, pénétration, (sodomie pas forcément et, selon la demande, chaque acte se négociant d’un double point de vue émotionnel et financier).
  2. De fellation et ensuite de pénétration, pas de sodomie.
  3. De pénétration directe sans fellation préalable, sodomie en option selon le choix  et l’acceptation de chacune des protagonistes.
  • Ce qui m’interpelle, c’est que l’acte technique de la fellation est moins onéreux que « l’amourou le complet… ». Il est particulier pour ces filles de monnayer moins cher l’acte de sucer un pénis avec le goût et l’odeur de chacun que de se laisser pénétrer « simplement ». 
La fellation et le cunnilingus se réservant à l’intimité de chaque couple en alliance sexuelle, il serait plus logique, pour ces filles, de ressentir plus d’humiliation ainsi que de dégoût à faire une fellation à un inconnu, (avec tous les aléas que cette pratique demande) ; donc de demander plus cher pour cet acte partiel en tant que privilège spécial qu’elles accordent. Mettre un sexe dont « vous n’êtes pas amoureux » en bouche, avec les odeurs du mâle et ses traces résiduelles d’urine ainsi que le goût du sperme, au final est quand même très particulier.
Projet masochiste inconscient, rapport de pouvoir à l’argent ou dépassement psychique ?
Et bien c’est au contraire, pour le « complet » ou « l’amour » (terme un peu    « spécialement » poétique dans le cadre de la prostitution) que ces femmes demandent plus d’argent. C’est dans la comparaison scientifique des pulsions partielles ou du coït (destinée sexuelle orthodoxe !) que ces femmes monnayent plus cher leur corps entier que leur bouche humiliable ou non…
Comme si, au final, elles vivaient inconsciemment une importance réelle et symbolique à la fois (majorable financièrement ou majorée d’une motion issue d’une sensibilité ?) du rapport sexuel complet autant qu’entier plutôt que de l’acte isolé, en tant que motion narcissique ?
Au-delà, pour certaines, d’une réelle détresse financière, il serait intéressant d’ouvrir le débat sur le plan masochiste que résolvent ces femmes (passivité positive et négative à la fois) ainsi que sur leur illusion narcissique ainsi que leur pouvoir narcissique de posséder tous les hommes qui vident en plus, la bourse argentique pour se vider les bourses spermiques dans une des entrailles (bouche, vagin, anus) ouvertes de leur corps physique, séparées ainsi, du contact émotionnel. A part le mécanisme de défense premier, le refoulement, cette position est à mon avis impossible à moins que de s’être reléguée au rang d’un robot désincarné, vidé de la chair sensible tant que épi-dermique (dans le sens de la racine grecque « épi » signifiant à la surface de, en ce sens, la  relation complète est une symbolisation).
« Dans les rêves, l’imaginaire et l’inconscient la liquidité monétaire de l’homme apparaît souvent comme un équivalent de sa production testiculaire ». (Didier Dumas, in La sexualité masculine, pp. 108).
Les traces des pulsions partielles originelles : remarques de Robert J. Stoller (« L’Imagination érotique telle qu’on l’observe ») et de Jean-Georges Lemaire (Le couple : sa vie, sa mort)
« Les hommes fétichisent – déshumanisent – les femmes pour accéder à la stimulation érotique (…). Dès la toute petite enfance, les gens vivent des frustrations, des traumatismes qui leur sont infligés par ceux auprès desquels ils recherchent intimité, dépendance et amour. Les conflits qui en découlent et les solutions mises en œuvre apparaissent à quiconque observe des bébés, des enfants, des adolescents, des adultes. La solution qui, à mon sens, affecte le plus la vie érotique, c’est la vengeance. Déshumaniser, c’est prendre sa revanche ; c’est l’annulation du sentiment d’être victime. » (identification avec l’agresseur). « Déshumaniser, c’est la fuite de l’intimité »  (et ses dangers rappelant la fusion première). « L’intimité sexuelle est menaçante pour tant d’individus. » (Robert J. Stoller).
« Au début, les partenaires d’un couple se choisissent inconsciemment pour se protéger l’un et l’autre de leurs pulsions partielles. Ensuite, l’un des partenaires du couple vivra le « retour du refoulé ». Ce contre quoi ils se protégeaient, mettra leur couple en crise ou bien, par un renouveau de la sexualité, apportera un sang neuf à leur couple. Jean-Georges Lemaire (pp 251, Le couple : sa vie, sa mort) parle alors de « seconde lune de miel ». « Mais le partenaire peut soit refuser de donner lui-même satisfaction à la pulsion. » Le couple vivra une crise définitive ou bien « le partenaire accordera la satisfaction des pulsions partielles sur des objets extérieurs au couple. ; soit, donner lui même satisfaction à la pulsion jusque-là refoulée de son partenaire, quitte à subir lui-même une évolution intrapsychique plus ou moins importante, par exemple en levant certaines de ses inhibitions, en renonçant, dans la mesure où il le peut, à certaines de ses défenses propres, en laissant pénétrer dans son propre champ de conscience des représentations mentales jusque-là refoulées chez lui-même, etc. »
« Dans les couples, au-delà du retour du refoulé concernant l’Oedipe ou bien l’homosexualité, c’est, d’après Jean-Georges Lemaire, le retour du prégénital qui est la fonction la plus expressive : « Nous avons vu combien le refoulement et les mécanismes de défense (Le couple : sa vie, sa mort, Jean-Georges Lemaire, pp. 248) contre les traces des désirs œdipiens jouaient un rôle structurant dans le choix conjugal et dans la structuration du couple, et combien le retour du refoulé était important  au cours des phénomènes de crise. Le refoulement puis le retour du refoulé jouent également un rôle fondamental en ce qui concerne le jeu des dispositions homosexuelles au sein du couple. Mais c’est sans doute à propos des pulsions prégénitales que cette dynamique refoulement – retour du refoulé est la plus expressive. Si le couple s’est choisi et structuré pour réprimer collectivement ces pulsions prégénitales, leur retour introduit ou plus souvent traduit directement la crise. Bien souvent, les pulsions partielles réprimées ou refoulées s’expriment directement au cours de passage à l’acte à l’occasion de relations extraconjugales. Les nombreux cas (cités) montrent que le partenaire, objet et moyen de ces relations, est souvent choisi en fonction de caractéristiques qui l’opposent point par point au conjoint légitime. C’est autour d’une pulsion non satisfaite et à satisfaire que s’organise le choix de l’aventure, parfois celui de la liaison un peu plus longue. » (Jean-Georges Lemaire).
Donc, la sexualité, pour être et rester vivante ne peut se passer de la perversion en tant que jeux sexuels. Les jeux sexuels apportant du piment dans la vie sexuelle du couple. L’instauration des pulsions partielles dans une vie de couple peut redonner de l’énergie sexuelle, psychique et émotionnelle à un couple en train de s’appauvrir sexuellement. Ce retour du refoulé pouvant donner une nouvelle naissance à la vie d’un couple. Et dynamiquement, c’est après la naissanceque le bébé subit les pulsions partielles. Dans le cas d’un couple s’étiolant cela serait pour renaître qu’il y retourne (concept de toujours retourner à la matrice originelle en tant que névrose de base !)…

  • Fin de la première partie - cf les articles n°2 et n° 3 pour la suite de ce sujet.

Copyright - Patrick FRASELLE
Le 07 septembre 2014 for - texts, links and pictures - checked and locked.
Marcel Gromaire, Le Couple, 1936, huile sur toile.
Marcel Gromaire, Le Couple, 1936, huile sur toile.

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